SUR D'ETRANGES MEGALITHES, LES PAS DU JUIF ERRANT !
Est-il rien sur la Terre
Qui soit plus surprenant
Que la grande misère
Du pauvre Juif errant ?
Que son sort malheureux
Paraît triste et fâcheux !
LES PAS DU JUIF ERRANT
SUR DES MEGALITHES PERIGOURDINS
L'auteur du "Périgord Insolite" (Serge Avrilleau) analyse de curieux mégalithes creusés de cupules, de bassins et d'empreintes pédiformes. Il constate que des civilisations antiques adoraient le Soleil qui était leur dieu suprême, sur toute la planète. Le Périgord n'ayant pas échappé à ces coutumes ancestrales, qui sont à l'origine de festivités païennes christianisées, l'auteur a recherché et trouvé d'importants monuments rupestres et monolithiques ayant servi manifestement d'horloges astronomiques et de calendriers, où se trouvent des postes d'observation taillés dans le roc depuis des millénaires, dont certains ont aussi servi d'autels de sacrifices et d'autres de remèdes thérapeutiques. L'auteur étudie les différentes hypothèses émises par les chercheurs et curieux qui tentent depuis plus d'un siècle de percer ce mystère.
LES MEGALITHES DE SAINTE-ORSE
A Sainte-Orse, dans cette commune du Périgord, au nord de Périgueux, dont le caractère géologique et paysager est celui des causses calcaires plantés de chênes rabougris fournisseurs de truffes noires, d'étranges ouvrages rupestres se manifestent par dizaines, à la curiosité des promeneurs, des chercheurs, des ésotéristes et des amateurs de manifestations insolites.
D'innombrables rochers blancs apparaissent un peu partout sur le territoire communal et ne manquent pas d'impressionner le visiteur peu familier de ces contrées. Les géologues leur expliqueront qu'il s'agit de roches jurassiques contemporaines des dinosaures, et que l'étage particulier qui concerne ce territoire de Sainte-Orse est du type "Cargnolle" caractéristique par son aspect dolomitique. Les spéléologues leur diront que cette roche est idéale pour la formation des grottes, qu'elle forme des "lapiaz karstiques" et qu'à quelques kilomètres de Sainte-Orse se trouve l'un des plus profonds gouffres du Périgord: "L'eydze d'Ajat". Et les ésotéristes invétérés ne manqueront pas de prétendre que des extra-terrestres ont posé leurs pieds sur ces rochers lors de l'atterissage de quelque soucoupe volante.
François de La Clergerie, radiesthésiste périgourdin, expérimente son pendule sur le Dolmen de Peyrebrune, à Sainte-Orse -24-
On doit bien reconnaître que ces étranges "coups de gouge", entailles verticales bien connues des géologues et ces perforations spectaculaires où passerait un bras humain peuvent laisser perplexe le premier visiteur venu. Or les quelques excavations de ce type que la nature a placées à la surface des roches plates et qui sont souvent jumelées, affectent quelquefois la forme d'un pied humain qui se serait incrusté dans la matière molle avant son durcissement séculaire. Nos ancêtres protohistoriques n'ont sans doute pas manqué d'être impressionnés par ce phénomène et n'auraient alors pas hésité à lui attribuer quelque intervention surnaturelle. Sans doute aussi ont-ils quelquefois un peu aidé la nature en aménageant ces étranges cavités, de manière à ce qu'elles correspondent à la mensuration d'une pointure puissante, digne de la réputation des géants et des colosses qui devaient peupler leurs légendes.
Empreinte pédiforme de La Germenie à Sainte Orse
Il faut dire, sans plus attendre, que le phénomène n'est pas exclusivement périgourdin mais qu'au contraire il est signalé sur l'ensemble du territoire français et s'étend bien au-delà, ce qui contribue à faire disparaître toute suspiscion de plaisanterie locale. Au plan historique, dans l'Antiquité, ces pas de géants furent tout d'abord attribués, sans doute, à des entités imaginaires que nous ignorons, à des idoles païennes ou à de redoutables envahisseurs et, par la suite, aux héros connus de la mythologie grecque ou latine (Samson, David entre autres) puis, au cours du temps, aux célèbrités de la littérature romantique (Gargantua, Roland). Après la christianisation de la Gaule l'Eglise tenta de débaptiser les lieux païens et ceux-là portèrent désormais des noms évangéliques (membres de la Sainte Famille et Dieu lui-même). Mais bien des sites isolés, qui ne furent pas portés à sa connaissance, gardèrent leur appellation d'origine et c'est le cas des roches à empreintes de cette commune de Sainte-Orse, en Périgord.
Empreinte pédiforme,à Sainte Orse
Ici les pieds humains sont seuls représentés (à une exception près) mais, dans d'autres régions, ils ne sont pas les seules parties de l'anatomie représentées; C'est ainsi qu'on trouvera des mains, des genoux, des coudes, des talons .... et, à Ste Orse,... des fesses!
Ces traces sont souvent accompagnées de celles d'un bâton, d'une canne ou autre outil et accessoire, ou encore de la trace d'un sabot de l'animal qui accompagne généralement le héros, le géant, l'ogre ou le saint ainsi vénéré. Il se trouve que, dans ce village périgourdin de Sainte-Orse les pas inscrits sur les tables rocheuses sont attribués au Juif Errant, dont il va être utile de rapporter la légende et au sujet du quel Aimé Giron, Eugène Sue et Jean d'Ormesson, entre autres, écrivirent de si beaux textes:
Lorsque Jésus fut entraîné hors du prétoire, portant sa croix pour être crucifié, le juif Cartaphilus, portier de Ponce-Pilate, poussa Jésus par derrière avec le poing en lui disant d'un ton de mépris: « Jésus, marche plus vite! Pourquoi t'arrêtes-tu ? ». Alors le Christ, portant sur cet homme un regard triste et sévère lui répondit: «Je marche comme il est écrit et je me reposerai bientôt; mais toi, tu marcheras jusqu'à la fin des temps. »
Dans un roman consacré au Juif Errant, Alexandre Dumas le nommait "Isaac Laquedem". Albert Londres écrivit "Le Juif Errant est arrivé" et Henri Meyer "Le Juif Errant est de retour". Quant à nous, retournons à Sainte-Orse, en Dordogne, où se trouvent de si étranges mégalithes:
L'ETUDE DE MONSIEUR CEROU
Dans une étude très documentée M. Elysée Cérou, président du Groupe Archéologique de Monpazier, a étudié méthodiquement les empreintes de pieds ou de chaussures de la commune de Sainte-Orse. Il pense qu'on n'a pu attribuer au Juif Errant la paternité mythologique de ces traces qu'à partir de la parution en 1845 de l'oeuvre d'Eugène Sue, bien que cette légende remonte à l'époque du Christ et bien que ce roman-feuilleton s'éloigne passablement de la réalité historique. M. Cérou pense qu'avant cette date de 1845 les empreintes pédiformes étaient sans doute attribuées à Gargantua ou à tout autre géant légendaire, comme c'est le cas dans bien d'autres lieux français. Il faut bien admettre que la christianisation du Périgord remonte au 6ème siècle et que la pénétration évangélique ne s'est pas facilement introduite dans les campagnes avant la publication des oeuvres imprimées. Pendant longtemps les colporteurs étaient les seuls, après les troubadours, et après les druides, à véhiculer les légendes et les mythes. Et, avant l'attribution de ces curiosités au Juif Errant, il est fort probable qu'elles aient porté le nom de quelque géant mythologique antérieur, alors que Gargantua fut popularisé par l'oeuvre de Rabelais au 16ème siècle seulement mais existait bien avant, notamment sous le nom de Gayant, qui veut dire Géant et qui fait encore aujourd'hui l'objet de festivités votives dans le Nord (Douai). Si la datation exacte des empreintes pédiformes demeure incertaine, en revanche sur le plan de leur signification symbolique, M. Cérou a fait avancer la recherche d' "un pas de géant" . Comme Serge Avrilleau, il compare la représentation des pas humains à l'expression d'un mythe de la marche ainsi que de la "démarche" spirituelle qui l'accompagne, et particulièrement au thème des pèlerinages, et en particulier les grandes itinérances vers Jérusalem ou Saint-Jacques-de-Compostelle. Ces chercheurs autodidactes se réfèrent notamment aux représentations de semelles gravées systématiquement sur les parois des prisons comme celle des Templiers de Domme où le chanoine Tonnelier croyait voir des poissons (*) ou celles qui sont représentées sur les murs des églises tout au long des chemins jacquaires, (* voir cet article dans ce blog). Ne voit-on pas, dans une église romane de la saintonge, au bord de la voie jacquaire, une semelle gravée sur la pierre, contenant un "pentagramme" (étoile à 5 branche) comme à Donzère ? !
On peut voir encore dans un souterrain du Lot-et-Garonne, non loin de la plus grande commanderie templière de ce département des semelles de chaussures, gravées sur une paroi. Mais les amateurs de graffitis pensent que ce symbolisme de la marche n'est peut-être pas le seul à considérer et que certaines interprétations leur échappent pour l'instant, par exemple celles qui concernent le compagnonnage et leur "Tour de France" dont les idéogrammes couvrent les murs des églises romanes, à l'intérieur comme à l'extérieur; c'est aussi le cas des marques de tâcherons. On pourrait également avoir à faire à des signes de reconnaissance ésotériques de la part de sectaires, d'alchimistes ou de sorciers.
Mais les pas creusés sur les rochers du Périgord en général et de Ste Orse en particulier, répondent-ils parfaitement à ces témoignages symboliques ? certes non ! Et ils en demeurent alors encore plus mystérieux. M. Philippe Devaux, chercheur local de Ste Orse a observé un nom de lieudit curieusement évocateur du mythe de la marche: "Trotte-Savate", non loin d'un autre toponyme: "Les tombes des Pauvres Prêcheurs". Curieux non ?
Ces étranges découvertes ont interpelé M. Cérou qui a alors fait le rapprochement avec certaines pratiques de la secte des Vaudois étudiée entre autres par le savant Maurice Broëns qui signale une sous-secte des "Ensavatés" ou "Ensabatés" ou encore "Pauvres de Dieu" réputés pour leur infortune et leur "errance" comme celle des vagabonds et autres "traîne-savate". Leur signe de reconnaissance serait-il une empreinte pédiforme ? On sait aussi que l'Inquisition accusait les hérétiques de pratiquer le "sabbat" et de là à glisser sur le "shabbat", repas rituel et hebdomadaire des juifs, errants ou non, il n'y a qu'un pas ! D'ailleurs, l'errance des juifs, leur "diaspora" n'a jamais cessé depuis la fameuse malédiction et leur persécution n'a jamais vraiment vu de fin, même après la création de l'état d'Israël, comme quoi les paroles d'évangile ne sont pas de vains mots et les dix commandements ne se doublent pas de vingt maux.
Pas creusé à Sainte Orse (photo s.a.)
Pour revenir, les pieds sur terre, sur cet étrange plateau calcaire de Sainte-Orse, faisons l'inventaire précis des empreintes pédestres qui creusent ces curieux rochers depuis des siècles:
Aux Grézaloux se trouvait il y a quelques années une pierre qui a été déplacée depuis. Large de 70cm et longue de 1m cette pierre plate comportait en son centre l'empreinte d'un pied humain chaussé, d'une longueur de 30cm sur 22cm de largeur. Une autre pierre portant la même empreinte se trouvait accolée à la première.
Au lieudit Les Maisonnettes, où se trouvait autrefois un village de cabanes en pierre sèche, aujourd'hui en pleine forêt, on trouve divers rochers calcaires portant sur leur face plane des excavations naturelles dont certaines semblent avoir été aménagées par la main de l'homme; Celle qui est baptisée "Le Pas du Juif Errant" mesure 30cm de long et 22cm de large, creusée au centre d'une pierre plate de 1m x 80cm. On voit aussi à proximité des cupules circulaires dont certaines jumelées, une rainure profonde semblant figurer la patte d'un cheval et une gravure que M. Cérou interprète comme le dessin d'une maison surmontée d'une échelle.
A la Germenie, sur le bas côté d'une route rectiligne qui a pu être romaine et qui aboutit à un carrefour important de cinq ou six chemins, une pierre plate de 80cm x 65cm porte l'empreinte d'un "Pied du Juif Errant" de 32cm de longueur. La partie médiane de cette chaussure en creux est évasée, jusqu'à 30cm, en deux lobes qui donnent à l'ensemble un aspect quadrilobé que M. Cérou compare aux mandorles de la décocation architecturale des sculptures médiévales.
A l'orée d'un bois couvrant une pente boisée située en contre-bas d'un village (gardé volontairement secret) de la commune de Ste Orse, une autre pierre plate de 80cm x 65cm, dépassant du sol de 40cm à 20cm, porte au centre de sa surface la cavité qui justifie son appellation de "Pas du Juif Errant". Cette excavation, manifestement aménagée de longue date, mesure 37cm de longueur pour 20cm de largeur. Les côtés sont élargis et donnent à l'ensemble la même allure de mandorle quadrilobée observée précédemment.
Au lieudit évocateur des "Clauds Vieux" où demeurent M. Ursi, l'un des plus grands numismates du Sud-Ouest, et sa maman, se trouvent de nombreux mégalithes, tous plus curieux les uns que les autres: Ressemblant à une stèle au-dessus d'une tombe, nous avons d'abord un petit menhir surplombant une pierre plate et formant le point de départ d'un alignement de pierres plates qui aboutissent aux ruines d'une ancienne cabane effondrée. Ensuite, dans une orientation perpendiculaire à l'alignement qui précède, se trouve une autre pierre dressée, en forme de menhir, surplombant elle aussi une pierre plate allongée aux dimensions d'une tombe.
Et enfin, sur le versant de la colline, dans une forêt possédant de multiples rochers calcaires tourmentés que les spéléologues appelleraient un "lapiaz" l'un de ces rochers attire particulièrement l'attention puisqu'il porte le cinquième pas du Juif Errant, mesurant 30cm de longueur pour 22cm de largeur sur la partie plate d'une pierre de lm60 de côté. Philippe Devaux qui l'a signalée a dégagé les flancs de ce gros mégalithe et y a découvert d'énormes "coups de gouge" à l'effet spectaculaire. Il s'agit de phénomènes naturels communs aux formations karstiques et bien connus des géologues, mais l'empreinte pédiforme est l'oeuvre (mystérieuse) de l'Homme.
On aurait également signalé à Ste Orse d'autres empreintes dites du Juif Errant, notamment sur le pont de la Soue, aujourd'hui disparue et une autre au Baillargeau, dépassant du sol de 60cm, ce qui obligeait à lever la jambe pour introduire un pied dans l'excavation, geste symbolique s'il en est.
On signale aussi un autre pas creusé découvert à Grandchamps sur un linteau de pierre récupéré dans une ancienne muraille.
En comptant les deux excavations des Grézaloux, celle de la Germenie, celle des Maisonnettes, celle de l'orée du bois, celle des Clauds Vieux, celle de Grandchamps et les deux disparues, du pont de la Soue et du Baillargeau, c'est une dizaine de pas du Juif Errant possédés par cette seule commune de Ste Orse. Or le département de la Dordogne n'en possède que très peu par ailleurs:
Au Var, commune d'Azerat, immédiatement voisine de celle de Ste Orse et pouvant donc être associée au lot précédent, on trouve encore une pierre plate de 90cm sur 70cm possédant en son centre un "Pas du Juif Errant" de 38cm de long pour 18cm de large.
LA PIERRE DU BENITIER
Dans un article rédigé par M. Michel Hardy dans le bulletin de la Sté Hist. & Arch. du Périgord, cet ancien conservateur du Musée de Périgueux a décrit une pierre intéressante située sur la commune de Villac, en Dordogne, située sur le plateau du Chalard et qui est connue sous le nom de "Pierre du Bénitier". Il y a lieu de croire que cette curiosité s'assimile sans mal aux "Pas du Juif Errant" de Ste Orse, située à 12km seulement. M.Hardy lui-même convient que cette cuvette peut être comparée à celle située près de Lougnac, en Corrèze, dénommée "Le Pied du Bon Dieu" qui a la forme d'un pied humain.
Pérégrination bibliographique:
M.Cérou signale quelques références bibliographiques intéressantes: notamment l'ouvrage de Pierre Delacretaz qui décrit trois gros rochers: l'un d'eux est situé à 2700m d'altitude, dans le canton de Vaud, en Suisse, et possède une empreinte de pied humain gravée superficiellement. Sur le second rocher, situé en Savoie, près de Lanslevillard, à 2740m d'altitude et dite "Pierre aux Pieds", on compte 82 empreintes pédiformes, dont 35 paires et 12 pieds seuls, ansi qu'une quinzaine d'empreintes diverses, seules ou par deux. L'auteur en signale aussi à Ostie, près de Rome, dans les temples de Mithra.
L'ouvrage de Raymond Christinger signale quant à lui la présence de pieds ou chaussures gravées en divers points de l'Europe: la Suisse, l'Italie, le Val Camonica, la France, la Russie et la Scandinavie. Elles seraient, d'après cet auteur, d'origine protohistorique. Il propose une piste intéressante: ces empreintes gravées symboliseraient le passage d'une divinité entre le monde visible des vivants et le monde invisible des morts. Ce mystère ésotérique consiste en effet à franchir le pas d'une porte virtuelle et à faire "le grand pas" vers l'au delà. Encore un rite de passage comme les a étudiés particulièrement Arnold Van Gennep (voir plus loin). Il pourrait y avoir aussi, d'après ce même auteur, un rapport entre ce rite de passage et le culte chthonien de l'ours, les familles gallo-romaines du nom d'Ursini, Ursinus (et Ursi?) étant descendants de desservants des temples d'Artémis dont on sait qu'elle avait transformé la nymphe Callisto en ourse pour la soustraire aux assiduités de Zeus. Si, par ce biais, on retourne à la famille de Saint-Ours qui serait à l'origine du nom de Sainte-Orse (et aucune sainte n'ayant jamais porté ce nom), alors la boucle est bouclée.
Mais, puisque nous parlions de cette mythologie du proche orient, tournons nos regards vers Ephèse où se situait l'une des sept merveilles du Monde: le temple d'Artémis et, puisque nous sommes en Turquie, allons visiter l'une des trois vallées de Zelve où Serge Avrilleau a signalé une paire d'empreintes de pieds humains, à l'entrée d'une mosquée rupestre. Ces deux pas là n'ont sans doute pas la même signification que ceux de Ste Orse; Il s'agit peut-être et sans doute d'inviter tout musulman à y déposer ses babouches avant d'entrer dans le sanctuaire, c'est à dire à franchir le pas entre le monde profane et le monde sacré. Dès lors, qui peut dire quels sont les liens spirituels qui pourraient relier ces différents rituels ?
Christian Carcauzon (voir son blog "argentine24") signale, dans la commune de Bourdeilles, Chez Toiras, un sentier d'empreintes pédiformes qui dévale du sommet de l'abrupt dominant la Dronne jusqu'à la rive gauche de la rivière, aboutissant à un singulier et mystérieux pédiluve. Il nous rappelle aussi qu'un véritable escalier d'empreintes de pieds humains relie les cluzeaux de "L'Eycholier" à celui dit "de l'Eglise". (voir dans ce blog l'article sur les cluzeaux).
Le Trône du Roi des Chauzes, observatoire antique du solstice d'hiver.
Serge Avrilleau signale cette empreinte de pas humain qui est creusée sur le "Trône du Roi des Chauzes", en Périgord, à Antonne. Cet étonnant fauteuil a été aménagé par l'homme dans une petite carrière qui a bien failli endommager le superbe rocher à cupules qui l'accompagne, presque au sommet de cette colline, actuellement boisée, qui a fait l'objet de multiples vénérations depuis des temps immémoriaux, aux portes mêmes de Périgueux.
M.le Marquis de Fayolle, érudit et archéologue périgourdin, a étudié minutieusement les cupules de cette roche mystérieuse et les rigoles qui les relient entre elles. Il a échafaudé à leur sujet l'hypothèse d'une correspondance avec les constellations stellaires, comme l'ont fait également les chercheurs qui se sont penchés sur ces étranges monuments qui sont assez nombreux en Europe. Il serait peut-être intéressant de comparer le nom donné à la Grande Ourse et à la Petite Ourse, au nom de la commune de Sainte-Orse. M. de Fayolle avait sollicité l'avis autorisé de M.Marcel Baudoin, le spécialiste en la matière, qui a confirmé le très haut intérêt du site d'Antonne et trouvé là un exemple supplémentaire pour étayer sa thèse du "méridien néolithique" (voir plus loin ). Sans fournir d'explications rationnelle, ce qui, à sa décharge, est parfaitement légitime, M.de Fayolle signalait le fauteuil et l'empreinte de pas qui sont manifestement en relation avec les cupules, comme nous avons pu le constater ailleurs.
Photo du Marquis de Fayolle (1913)
L'ancien village de Borie-Bellet, situé non loin de là, est totalement à l'abandon. En revanche il est important de savoir que, si la colline du Roi des Chauzes est l'objet d'une vénération multiséculaire, celle d'en face, dite de Borie Belet, l'est tout autant: elle possède en son sommet un empilement de roches calcaires qui donne l'impression de ne pas être naturel; Ce monument formant un cairn important est situé dans un alignement reliant le trône et l'azimut du soleil levant au solstice d'hiver. En d'autres termes, l'observateur qui serait assis dans le trône du Roi des Chauzes et qui se servirait du rocher de Borie-Belet comme point de mire, verrait se lever le soleil exactement dans cet alignement aux environs de Noël de chaque année, à quelques portions de degré près, en tenant compte de la déclinaison magnétique intervenue depuis l'époque de la création du trône.
Dessin du Marquis de Fayolle (bulletin de la SHAP)
A partir de ce grand "cairn" un très ancien chemin bordé d'une muraille de bornes calcaires conduit vers une clairière où se trouvent associés: un curieux souterrain et une série de silos à grains. On se doutera facilement que divers chercheurs, marqués par les travaux et les écrits de Maurice Broëns, de Pierre Nollent et de Jean Bordenave, n'ont pas hésité un instant à baptiser le souterrain "hypogée chthonien" et les silos "fosses à offrandes".
Jean-Claude Carrère, chercheur périgourdin passionné d'archéologie et de phénomènes curieux, a étudié dans tous ses détails le site d'Antonne (rocher à cupules, trône du Roi des Chauzes, pied creusé, cluzeau de Borie-Belet et Pic de Chaveyrou, toponyme local désignant le rocher du Roi des Chauzes. Dans la revue Subterranea, après avoir relevé les erreurs et confusions de Taillefer et de Saumande, J.C.Carrère aborde le sujet plus sérieusement: tout d'abord il relate comment le souterrain de Borie-Belet a été fouillé par la SHAP sous la direction de M. de Fayolle. Le souterrain était entièrement comblé de terre et de pierres en 1877, à tel point que les ouvriers avaient du mal à attaquer le tassement extrême du remplissage, ce qui a fait dire avec juste raison à J.C.Carrère que l'obstruction volontaire répondait sans doute aux exigences de l'Inquisition afin de mettre un terme aux activités occultes des hérétiques, au XIIIème siècle.
Pendant les fouilles, les fosses ovoïdes des alentours furent presque toutes vidées également, sans que les fouilleurs aient pris la précaution de noter les couches archéologique. Les nombreux tessons de poterie qu'on trouve habituellement dans les souterrains n'ont toutefois pu échapper aux archéologues amateurs qui les datèrent sommairement de l'époque gauloise. Ils remarquèrent aussi de nombreux ossements d'animaux et quelques moellons équarris provenant manifestement de la démolition d'une ancienne construction, les vestiges de quelques cabanes ayant autrefois recouvert ou délimité le site.
Serge Avrilleau, sans rejeter l'hypothèse de cultes païens et de rites chthoniens retenue par Carrère au sujet du souterrain de Borie Belet et des fosses ovoïdes qui lui sont associées, a fait toutefois quelques observations personnelles: Il voit dans le souterrain de Borie Belet toutes les caractéristiques d'un cluzeau classique du Périgord, à ceci près qu'il est tout simplement inachevé, ce qui expliquerait l'exiguïté de la seule salle qu'on y trouve; on avait sans doute prévu d'en creuser d'autres, mais le comblement intempestif, peut-être ordonné en 1229 par les injonctions de Raymond VII de Toulouse interrompit brusquement les travaux, ce qui, au passage, daterait avec précision le creusement en cours et le remblaiement. Il faut remarquer que les fosses ovoïdes sont beaucoup plus anciennes que le cluzeau puisque le creusement de la galerie souterraine les a percés par dessous, accidentellement. Les fouilleurs ont renouvellé du reste cette même découverte en procédant au déblaiement du souterrain et des fosses situées au-dessus.
L'exploration du souterrain de Borie-Belet nous donne également un nouvel exemple de mise en pratique de ce que S.Avrilleau appèle "La Règle des 26 coudées" qui s'applique parfaitement dans ce cas: les deux équipes de creuseurs (nécessaires pour multiplier le nombre d'ouvriers sans se gêner) se plaçaient exactement à cette distance avant d'entamer le creusement. L'une des équipes creusait alors l'escalier d'accès et l'autre équipe creusait, à 26 coudées de là, le puits d'extraction qui serait nécessaire pour évacuer les matériaux extraits de la dernière salle. Ils prévoyaient une marche au pied de ce puits pour y placer finalement de gros rochers pour fermer cette issue devenue inutile après les travaux, comme il était de coutume selon la tradition. Ces puits d'extraction sont toujours quadrangulaires pour y encastrer les madriers d'une "chêvre" à poulie et pésentent des pas creusés sur les parois. Pendant l'obstruction de ces puits on ménageait dans les angles des conduits d'aération à l'aide de tuiles ou de pierres plates disposées comme pour une cheminée. L'obturation systématique des puits d'extraction s'explique par la nécessité de limiter le nombre des points faibles du refuge et le nombre des gardiens et défenseurs. Les deux équipes de creuseurs se rejoignaient au cours des travaux, en un poin central facile à reconnaître. Et c'est exactement ce qui est arrivé aux deux équipes de fouilleurs, au 19ème siècle, qui ont employé inconsciemment la même méthode pour le déblaiement.
Les différents chercheurs s'accordent à considérer, en définitive, que si le cluzeau de Borie Belet a servi de souterrain-refuge, succédant sur le même site à une aire de silos à grains, il n'est pas exclu pour autant qu'il ait pu être utilisé ultérieurement à des fins cultuelles, voir rituelles. Toutefois, dans ce cas, se pose alors un épineux problème de chronologie car il faudrait imaginer que le gnomon de Borie Belet et le trône du Roi des Chauzes sont bien antérieurs au souterrain et aux fosses ovoïdes, n'ayant comme point commun que le seul usage ancestral d'un même lieu de vénération.
Il serait imprudent d'aller plus loin dans le champ incertain des hypothèses ... de peur d'y perdre pied, comme l'a écrit avec beaucoup d'humour M. Cérou. L'étude de J.C.Carrère se poursuit par l'exploration de la colline du Roi des Chauzes avec ses mystérieux vestiges: rocher à cupules, trône monolithique et empreinte de pied humain. La table rocheuse, presque horizontale, comprend 45 cupules réparties en 5 groupes. Le fauteuil de pierre est assez grand pour contenir 2 personnes assises ce qui pourrait faire penser facilement au siège d'un géant qui serait assis sur l'empreinte du pied. Il possède deux énormes accoudoirs sur lesquels sont creusées quelques cupules. J.C.Carrère a rappelé les remarques du docteur Baudoin au sujet du pied gravé sur ce fauteuil: Cette empreinte symboliserait le Dieu-Soleil lui-même, comme c'est le cas à l'Ile d'Yeu ou à St.Aubin-de-Baubigné (Deux-Sèvres). Carrère prend acte de l'hypothèse de Baudoin pour qui les sites de ce type sont des postes d'adoration et d'observation du soleil au solstice d'hiver (azimut 130°) c'est à dire le 21 décembre, fête païenne déplacée de nos jours à Noël, date présumée et sans doute oportunément déplacée de la naissance de Jesus-Christ.
La Peyre Dermale, observatoire antique
du Solstice d'Eté
Pour servir de comparaison au site d'Antonne, nous dirons quelques mots de la Peyre Dermale, étrange et spectaculaire monument mégalithique et rupestre qui se trouve en haut d'une colline du territoire de Paussac, en Périgord. Il s'agit également d'un empilement naturel de couches calcaires, un témoin géologique ayant pour surnom "Pierre de Sacrifices". Cette appellation s'explique par la présence de bassins et de rigoles qui sont bel et bien l'oeuvre de l'Homme, mais quel homme ? Ce site ne comportant pas d'empreintes pédiformes, à notre connaissance, nous verrons, dans un chapitre qui lui sera entièrement consacré, tout ce que ce merveilleux site contient de vestiges et d'énigmes. Ce qu'il faut dire, dans l'immédiat, c'est qu'il pourrait bien s'agir d'un poste dobservation antique du soleil au solstice d'été, comme Serge Avrilleau a pu l'expérimenter, en compagnie de Denis Saint-André, à 6h du matin, sur la table dite "de sacrifice" ainsi que depuis la niche qui est creusée derrière ce monument, face au soleil levant.
La Peyre Dermale à Paussac (24)
Dite "Pierre de Sacrifices".
Avant de quitter provisoirement la commune de Paussac, rappelons que des empreintes pédiformes existent dans les rochers troglodytiques du Breuil et que d'étranges cupules sont réparties sur un rocher plat au lieudit "Plaines de Puychaud", à proximité de tombes taillées dans le roc.
L'Astronomie aux temps protohistoriques
Nous n'avons pas oublié que le poste d'observation de La Peyre Dermale s'oriente vers le solstice d'été (55° le 21 juin, au lever du soleil) et que le rocher du Roi des Chauzes, vu depuis le trône, indique le solstice d'hiver (130° au lever du soleil). Ceci n'a pas échappé à la sagacité de Jean-Claude Carrère qui pousse jusqu'à admettre une sorte de conjonction providentielle entre le Dieu-Soleil et le Dieu-Rocher. En fait il est possible de surveiller les deux solstices à partir de tous les postes d'observation; tout dépend de quels repères on dispose. Il est certain que le rocher du Roi des Chauzes s'imposait à Antonne pour une visée au solstice d'hiver alors qu'à la Peyre Dermale les repères manquent de nos jours à l'horizon, à moins que l'on considère que l'église de Paussac ait remplacé un ancien repère détruit par le site chrétien et que les autres repères aient disparu ou ne soient pas encore découverts. Mais, est-ce bien par hasard si, à 2km de la Peyre Dermale, dans l'azimuth exact du lever du soleil au solstice d'hiver, c'est à dire exactement à 130°, un lieudit élevé s'appelle encore aujourd'hui: LE REPERE ???
La Lune dans le Caniveau
Seul le petit rocher qui a subsisté près de la Peyre Dermale est orienté vers le solstice d'hiver au coucher du soleil. Serge Avrilleau et Denis Saint-André pensent même que, sur ce site de Paussac, il était possible d'observer le reflet de la lune dans l'une des vasques aménagée à cet effet sur la première plate-forme du monument quand elle est pleine d'eau, or il se trouve qu'elle ne tarit jamais ! Ceci aurait permis d'ajouter des observations astrologiques aux observations calendaires des druides ainsi que des règles et comportements opportuns connus et recommandés par les seuls initiés, en rapport notamment avec la croissance des plantes, la coupe des arbres, le moment des semailles et des récoltes ainsi que tous autres secrets de sorciers dépendant des influences de la lune sur les être vivants. Ajoutons que ces périodes sacrées de changements de saisons furent ponctuées de fêtes païennes dont la plupart furent adoptées et récupérées par la religion chrétienne et subsistent jusqu'à nos jours.
Hypothèses et Conjectures
Van Gennep et les rites de passage.
Arnold Van Gennep était incontestablement le grand spécialiste des "rites de passage". En 1909 il a consacré un ouvrage de 288 pages à ce sujet. Il ne semble pas avoir particulièrement étudié les empreintes pédiformes mais on peut noter certains "passages" de sa littérature qui pourraient se rapporter à ce phénomène: Ainsi le rite de passage peut être interprêté, dans un certain nombre de cas, comme l'idée qu'on sort d'un monde antérieur pour entrer dans un monde nouveau. L'expression "passer le seuil" signifie s'agréger à un nouveau monde. Tout juif pieux, chaque fois qu'il passe la porte principale de sa maison, touche du doigt de sa main droite la "mazuza", coffret fixé au montant de la porte et où se trouve un papier ou une bande d'etoffe portant, écrit ou brodé, le nom de Dieu (Shaddaï). Ce rite se poursuit par la prononciation d'une formule rituelle. D'autre part, les mots "Pâque juive" signifient "passage". C'est l'une des cérémonies d'agrégation qui, par un processus de convergence, s'est ensuite rattaché, entre autres, aux cérémonies du passage d'une saison à l'autre. Le rite qui consiste à faire passer quelqu'un par-dessus quelque chose consiste à enjamber l'obstacle ... pour sauter d'un monde dans un autre. C'est sans doute pour les mêmes raisons et selon les mêmes critères qu'on "débredine" les "bredins" (faibles d'esprit) en les faisant passer sous un sarcophage à Saint Menoux dans l'Allier ou dans la Pierre Percée près de Pons (17) pour obtenir une guérison selon les recommandations du docteur Henri Gaidoz. C'est sans doute aussi pour ces mêmes raisons que des goulots étaient franchis dans certains souterrains. (Voir Subterranea N°31).
L'apport de la Mythologie
Monsieur Henri Dontenville fut à la mythologie française ce que le Pape est à l'Eglise. Il a particulièrement étudié (ainsi que Claude Gaignebet), l'apport considérable de Gargantua dans le folklore de nos campagnes. Dans l'un de ses ouvrages il signale un "Pied de Saint-Sylvestre" gravé sur la "Pierre du Carosse" au sud de Murat, des empreintes de corps humains à la fontaine Saint Goustan, près du Croisic et un fantastique "Pas de Géant" à Saint-Just, dans le Cantal. Le folklore local les tient pour celtiques et l'auteur se contente de dire qu'ils font l'objet d'une vénération populaire. Dans un autre ouvrage il précise que Gargantua est le fils du grand Dieu celte.
LES ADORATEURS DU SOLEIL ET
LA MERIDIENNE NEOLITHIQUE
Les docteurs Baudoin et Boimoreau étaient donc, juste avant la première guerre mondiale, de grands spécialistes des monuments mégalithiques et de l'interprétation des manifestations humaines gravées ou sculptées sur ces pierres qu'ils ont particulièrement étudiées en Vendée où ils ont décrit et décrypté, entre autres, celles de Menomblet. Sur ce site exceptionnel on peut voir, creusées et associées sur des roches granitiques, des cupules et des empreintes de pieds, comme à Antonne ou à Sainte-Orse. La tradition locale les nomme: "Le Pas de la Demoiselle", "Les Pieds de Pierre Brune", "Les Pieds du Pont Beugnon", "Les Pieds de Chiron" et "Le Pas de Saint-Roch". Ce dernier (représenté plus haut) mesure 0,30m de longueur sur 0,13m de largeur. Le talon et la plante sont nettement différentiés, ce qui a fait dire à ces auteurs que l'empreinte pédiforme avait été réalisée par la jonction de deux cupules, comme ils l'ont constaté ailleurs.
L'étude minutieuse de l'axe principal d'orientation de cette empreinte et l'alignement de certaines cupules qui lui sont associées a décidé Marcel Baudoin à conclure qu'il y a corrélation avec l'azimut du solstice d'été, à Antonne (Borie-Belet) alors que l'orientation actuelle indique plutôt le solstice d'hiver mais qu'il faut tenir compte du déplacement magnétiqsue survenu depuis. En revanche le solstice d'été est bien "visé" actuellement à Paussac, comme le constatent Serge Avrilleau et Denis Saint-André pour la Peyre-Dermale où ils ont vu le soleil se lever à 6h du matin, un 21 juin, face à la niche d'observation. Baudoin pense que ces sites sont des postes d'adoration du soleil levant, les empreintes pédiformes symbolisant un Dieu-Soleil néolithique. En effet, compte tenu de la déclinaison magnétique consécutive à la précession des équinoxes, Baudoin identifie une "méridienne néolithique" et il situe la création de ces sites 7300 ans avant Jésus-Christ pour Antonne et 8500 ans pour Menomblet. Nous pensons aujourd'hui que ces monuments antiques ont fort bien pu servir aussi à déterminer les changements "officiel" de saisons, forts utiles pour l'organisation des tâches agricoles et que ces "passages" devaient s'accompagner de fêtes païennes, de libations rituelles et de sacrifices d'animaux expiatoires, ces festifités ayant été absorbées en partie par le calendrier et la religion chrétienne sous des appellations qui lui paraissaient plus orthodoxes: Saint-Jean d'été (et les feux rituels dont la tradition subsiste encore actuellement) et la Saint-Jean d'Hiver (Noël) pour les solstices; et d'autres pour les équinoxes. Observons que certaines de ces dates, légèrement déplacées, demeurent encore aujourd'hui comme repères de changement dans les baux ruraux. De très grands sites répondent de la même façon à ces mêmes critères: Stonehenge en Angleterre et Machu Picchu au Perou. Plus modestement, il existe en Lot-et-Garonne, entre Agen et Villeneuve-sur-Lot, un site d'observation du soleil et un trône taillé dans le roc:
Le Gnomon de Golfech (photo s.a.)
Le Gnomon de Machu Picchu (Perou) (Dessin s.a.)
Outre ceux dont nous avons parlé précédemment, nous connaissons d'autres fauteuils monolithiques d'observation: près de l'entrée du souterrain de Négrondes, en Dordogne, le "Trône du Temple Solaire" découvert par l'équipe Guasco sur les hauteurs de Belvès, en Périgord Noir et "Le Fauteuil du Diable" près de Rennes-le-Château:
Enfin, l'un des plus spectaculaires et des plus illustres fauteuils de pierre est celui de "La Jument" à Locronan (29) dite "Pierre sacrée des Druides" ou "Chaise Saint Renan" donnant les joies de la maternité aux femmes stériles:
Un observatoire solaire aux Etats Unis:
Au Nord-ouest du Nouveau Mexique, à l'entrée sud de Chaco Canyon, une zone actuellement déserte restitue aux archéologues un certain nombre de pueblos, villages antiques des indiens Anasazi. Un passionnant article de la revue Science Illustrée paru en 1990 nous restitue des éléments inattendus sur la vie de ces peuplades très organisées qui vivaient là entre ce qui est pour nous les XIème et XIIèmes siècles. Or une particularité étonnante nous est révélée en ces termes, dans ce village appelé Pueblo Bonito qui contenait 600 pièces d'habitation sur cinq niveaux et pouvait abriter un millier de personnes: "Des ouvertures ont été aménagées dans les angles de quelques habitations. En octobre, le soleil pénètre dans la pièce et projette sur le mur un fin rai de lumière. A mesure que l'on s'approche du jour le plus court de l'année, la tache lumineuse se déplace et grandit de trois centimètres par jour. Ceci permet d'anticiper la date du solstice d'hiver avec beaucoup plus de précision qu'une simple observation du soleil. En effet, à cette époque de l'année, le mouvement de l'astre par rapport à l'horizon est pratiquement imperceptible. Une importante formation rocheuse dénommée "Fajada Butte" domine le site. Les prêtres du Soleil pouvaient y invoquer leur dieu et observer ses mouvements à partir d'un observatoire: au sommet, la lumière du soleil traverse un alignement de trois pierres levées et étroites puis est projetée sur une spirale gravée dans la roche. Lors du solstice d'été, la lumière vient couper le milieu de la spirale, ce qui a conduit les chercheurs à baptiser ce duissitif du nom de "poignard solaire". Lors du solstice d'hiver la lumière se divise en deux. Les indications astronomiques étaient indispensables à ce peuple de cultivateurs qui adoraient le Soleil à l'instar de nombreux peuples indiens. Ce dispositif permettait la culture du maïs, base de leur nourriture. Des cérémonies visaient à célébrer les forces de la nature, notamment le soleil et la pluie, dans l'espoir de récoltes abondantes."
Par ailleurs on sait que, jusqu'en 1950, les indiens Zuni avaient un prêtre du Soleil, dont la fonction consistait à fixer la date des semailles et de la moisson.
AUTRES CURIOSITES MEGALITHIQUES
DE SAINTE ORSE EN PERIGORD
Nous n'en avons pas fini avec les curieux mégalithes de la commune de Sainte-Orse: Il nous faut d'abord parler du rocher de "Peyrebrune" qui est la seule grosse pierre de cette commune à être officiellement reconnue par les préhistoriens et encore sont-ils plutôt sceptiques à son sujet. Elle est située en altitude (220m), sur un plateau dominant une vaste contrée, à la jonction de diverses parcelles agricoles pour lesquelles elle a manifestement servi de borne cadastrale. La partie émergée au-dessus de la surface du sol de ce bloc de grés ferrugineux mesure 1,20m de hauteur et autant de largeur. Le célèbre archéologue de Mortillet signalait, à la fin du 19ème siècle, à Ste Orse, un "dolmen de Peyrebrune" et l'érudit périgourdin Wilgrin de Taillefer indiquait, à la même époque, l'existence d'une "grosse pierre" dite de Peyrebrune que certains qualifiaient de météorite. En fait ce mégalithe n'a finalement rien d'un dolmen ni d'un menhir mais on va voir qu'il a d'autres qualités:
Ce type de monument est généralement soupçonné d'avoir servi à pratiquer des rites funéraires dans une période dite "mégalithique" située entre la fin du néolithique et le milieu de l'âge du bronze (soit environ 4000 ans avant notre ère. Mais le prétendu dolmen de Peyrebrune, qui n'est d'ailleurs pas le seul à porter le même nom en Périgord, possède une particularité peu commune qui le distingue des autres mégalithes périgourdins: on y observe en effet une profonde rainure verticale en forme de rigole partant du sommet de la pierre pour parvenir jusqu'au sol. Cette "saignée" est considérée par les gens de la région comme la preuve qu'on a pratiqué sur cet "autel", peut-être "druidique", des sacrifices d'animaux, voire mêmes d'humains. M. Cérou pense que ces pratiques consistaient à rendre hommage à des divinités païennes en faisant pénétrer dans le sol le sang des victimes immolées en offrande expiatoire, comme on le fit autrefois en l'honneur de la "Magna-Mater". Notons que cette pierre comporte aussi un évidement que M. Cérou considère comme l'endroit où le sacrificateur s'agenouillait pour exécuter ses innocentes victimes. Ne quittons pas ce chapitre sans évoquer les dispositifs semblables qui existent à la Peyre Dermale dite "Pierre de Sacrifices" et qui font l'objet des mêmes hypothèses populaires.
D'autre part M.Cérou confirme ce qui nous a souvent été dit sur le choix de l'emplacement de ces mégalithes qui seraient situés au point d'intersection des lignes de forces magnétiques matérialisées notamment par le réseau "Hartmann". M. François de la Clergerie apporte sa confirmation par les moyens de la radiesthésie. D'après de nombreux auteurs le choix de cet emplacement procurerait une énergie particulière à ces pierres préhistoriques, positive pour les menhirs et négative pour les dolmens, d'où l'usage funéraire de ces derniers. D'autres encore, tels que les cromlechs où les pierres dressées verticalement sont disposées en cercle, semblent avoir servi d'horloges astronomiques et auraient guidé les prêtres de cette haute antiquité à déterminer les changements de saisons, comme il a été dit plus haut. Le plus célèbre cromlech du monde étant celui de Stonehenge, en Grande Bretagne, dont l'axe primordial est orienté vers le lever du soleil au solstice d'été.
Pour sa part, Serge Avrilleau, en ce qui concerne la saignée qui affecte le mégalithe de Peyrebrune à Sainte-Orse, a tenté une autre hypothèse, sans rejeter celles qui précèdent: Cette rigole lui paraît avoir été pratiquée depuis les époques préhistoriques, au regard d'une autre pierre de Ste Orse: la "Pierre Chèvre" qui porte également une rainure semblable et au regard aussi de certaines autres pierres comme "Les Fesses de Gargantua" à Champ-Cu (Côte d'Or). Il n'est pas éloigné de penser qu'on ait ainsi voulu aménager, pour une raison purement mythologique, le mégalithe de Peyrebrune, de manière à ce qu'il affecte ainsi une ressemblance avec le postérieur du célèbre géant. Il est par ailleurs possible d'ettayer cette hypothèse par la présence d'une autre pierre située au lieudit "Malaval", commune de Ste Orse, dont nous allons parler plus loin.
Georges de Peyrebrune, célébrité de Sainte-Orse.
Mais ne quittons pas le plateau romantique de Peyrebrune sans dire un mot de celle qui a contribué à lui donner une âme: nous voulons parler de Georges de Peyrebrune qui avait pris le pseudonyme (en fait son vrai nom d'état civil) de son village natal qui avait adopté lui-même le nom du dolmen. Cette nouvelle "George Sand" du début du 20ème siècle a donné à la littérature féministe quelques lettres de noblesse. Elle fut très célèbre en son temps et fut très courtisée à Paris par l'élite littéraire mais affectivement très réservée, suite à un mariage décevant. Elle fit partie du premier jury du Prix Fémina. Sa production de romans fut très prolifique; elle anima nombre de rubriques dans les revues féminines et termina misérablement sa vie dans la pauvreté, la maladie et la solitude. Pour en savoir davantage, lisez l'excellente biographie qu'en a faite J.P.Socard dans le bulletin de l'association "Sainte Orse, Mémoire & Patrimoine" dont Philippe Devaux est l'actuel Président.
Le postérieur de Gargantua à Saint-Orse ? .... Deux fois ?
Au lieudit "Malaval", près des Grézaloux, se trouve un bien étrange mégalithe, à la lisière d'un bois et d'un pré: la pierre mesure 1,60m de largeur et 0,70m de hauteur. La ressemblance, sans doute voulue et délibérée, est tellement évidente que la pierre appelée actuellement "Pierre Chèvre", en occitan "Peyro Chabro" porte aussi le pseudonyme confidentiel de "Pierre des Fesses". On dit dans le pays que les peuplades païennes y sacrifiaient des chèvres. M. Cérou la compare à un polissoir et il fait très justement remarquer que Maurice Broëns a signalé l'habitude qu'avaient les Vaudois d'immoler des chèvres, ce qui les faisait surnommer "Vaudous". Différents conciles et sinodes ont dénoncé et condamné ces pratiques hérétiques dès le 8ème siècle et ceci jusqu'au 17ème. Elles furent également attribuées aux Juifs, il faut le noter.
Ajoutons qu'à l'arrière de cette pierre curieuse semble se profiter la silouhette d'un "fauteuil", comme nous en avons signalé beaucoup d'autres. Mais rappelons nous la fente verticale pratiquée artificiellement sur le "Dolmen de Peyrebrune". N'aurions nous pas là une tentative de représentation d'un deuxième postérieur gigantesque ?
Le "menhir" du Chatenet
Le Chatenet, jouxtant de près le bourg de Sainte-Orse, est de toute évidence un important oppidum protohistorique et peut faire partie de la réserve de sites archéologiques à fouiller en Périgord, au même titre que celui de La Gonterie-Boulouneix, celui de Neuvic-sur-l'Isle, ou les forts antiques de Douville, Saint-Paul-de-Serre, Issac et bien d'autres, connus ou moins connus, voire méconnus. Sur le flanc de cet oppidum du Chatenet, on peut voir un autre mégalithe, de forme triangulaire, dépassant du sol de 1m80 et large à la base de 1m60; son épaisseur est de 60cm. Cette pierre plate posée de champ semble faire partie de l'enceinte périphérique entourant l'oppidum. Nous aurions tendance à assimiler cette pierre levée à un menhir. Il faudrait aussi voir de plus près les rochers à cupules disposés sur le plateau de cet oppidum. On notera, avant de quitter le Chatenet, que les grottes situées sur le même escarpement ont sans doute servi de sépultures aux temps préhistoriques.
LES PAS DE ROLAND
Suite aux publications des chercheurs de Sainte-Orse, M. Séré, président du Syndicat d'Initiative de Laroque-Timbaud, en Lot-et-Garonne, s'est manifesté pour signaler quelques empreintes de pieds attribuées à Roland, héros légendaire national. Près de Laroque-Timbaud existe un rocher sur lequel on pourrait voir "Le Pas de Roland" s'il n'était pas situé dans une propriété privée. Un moulage existe au S.I. et une reproduction a été placée à proximité du lieu d'origine, au bord d'une ancienne voie romaine. Il est particulièrement intéressant de savoir qu'à 200m dudit "Pas de Roland" existe une "Chaise du Roi" autrement appelée "Chaise de Sorcier". Et M. Séré signale que d'autres empreintes pédiformes jalonnent, tous les 6km, une "Route de Roland", suivant la voie romaine conduisant aux Pyrénées.
Les Pierres qui guérissent:
On ne compte plus les pierres mégalithiques contre lesquelles il faut frotter la partie malade de son corps pour en être guéris ou obtenir la fécondité et nous nous sommes interrogés au sujet de la "Pierre de Sacrifice" de Paussac dont il est question plus haut et dont le nom officiel est "Peyre Dermale". Les éthymologistes s'interrogent pour savoir s'il ne s'agirait pas d'un rocher capable de guérir les maladies de peau ? En attendant leur réponse, les suggestions des lecteurs seraient les bien venues.
On signale aussi ces pierres des veilles murailles, surtout celles des églises romanes, dont il faut récupérer la poudre pour guérir la diarrhée des enfants en l'ajoutant à leur soupe.
Inventaire des mégalithes cultuels et rituels du PERIGORD
Liste proposée par WLGRIN de TAILLEFER en 1821:
-Les Pierres Rouges (entre Mareuil et Vieux Mareuil).
-Les Grosses Pierres (entre Baie et Argentine).
-Les Pierres Brunes, près de Rouffignac et du château de Latour.
-La Pierre Longue près du moulin à vent de Doissat.
-La Tranche de Saumon près de Lalinde.
-Le Roc de Peyroux, entre Montpazier et Fontgalop. portant les "Griffes du Diable".
-Une obélisque à 500 pas du château de La Coste près de Fontgalop.
-Trois "peulvans" sur le chemin de Berbiguières à St.Pompon.
-Restes épars d'un obélisque gaulois sur le chemin de Bouzic à St.Martial, servant de clôture, un auttre énorme et un troisième.
-La Pierre Fite dans la plaine de Libourne près de St.Emilion.
-Lou Peyoteu, menhir abattu et brisé dont il reste 2 gros morceaux: à Ecorneboeuf au levant de la grande coupure.
Monuments naturels ayant fait l'objet de rituels ou de légendes:
-Le Roc de la Selle, au delà de St.Martial sur le chemin de Gourdon.
-Le Roc de Périgord (même chemin de Gourdon) à la frontière de l'ancienne province.
-Le Roc de Roquier à Léobard: empreintes de pied (cheval et mulet).
-Saint-Pardoux, près de la route de Brantôme à Nontron, au dessus-de la Fontaine de Vendôme (pierre énorme avec légende).
Taillefer signale le VER SACRUM, assemblée gauloise qui avait lieu à l'équinoxe de printemps, où les "Etats Généraux" décidaient s'il était nécessaire pour le repos public que la jeunesse partit pour faire des conquêtes et s'établir ailleurs. (démodé ?)
Autres sites signalés, notamment par de Gourgues et Cérou:
-Festalemps: "Peyro Sinagoga" (référence judaïque ?).
-St.Jean de Côle: "Le Piedroy" (Pied droit ou Pied de Roy ?).
LA PEYRE DERMALE EST ELLE MIRACULEUSE ???
Lors d'une excursion à La Peyre Dermale, le 28 mai 2011, en présence d'une cinquantaine de témoins, nous avons pu constater que la vasque supérieure du monument était toujours pleine d'eau, alors que la sécheresse et la canicule sévicent sévèrement dans toute la région !!!
F I N
(provisoire)
<FONT color=#33ff33 s
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 42 autres membres