LE PERIGORD INSOLITE

LE PERIGORD INSOLITE

DES TEMPLIERS ont-ils été emprisonnés à DOMME ?

D O M M E ...  en Périgord noir ...

Après leur arrestation le vendredi 13 octobre 1307, on dit que 70 templiers ont été emprisonnés dans les cachots de la Porte des Tours de Domme. Avant d'être jugés de la manière la plus ignoble, d'être exécutés pour certains, ou de s'être évadés, pour d'autres, ont-ils laissé sur les murs de leur "ergastule" des témoignages émouvants affirmant leur foi chrétienne sans rapport avec les accusations infondées de leurs accusateurs ? Pour en avoir le "coeur net"  Serge Avrilleau et son équipe ont effectué le relevé direct et minutieux de ces poignants graffitis et dessins mystérieux et symboliques. Car ils émettent des doutes sérieux sur l'interprétation qu'en avait faite le chanoine Tonnelier en 1970, alors que le comportement de l'ecclésiastique a éveillé d'importantes suspicions à Saint-Emilion, à Gisors et à Chinon en autres. Une mise au point enfin réaliste sur les plus beaux graffitis (présumés) templiers de France.

 

QUI SONT-ILS ?

D'après M. André Goineaud-Bérard (SHAP 2000-2) on connaît désormais le nom de 70 templiers qui ont peut-être été emprisonnés à Domme, amenés de Paris en 1311, après déposition devant la Commission pontificale. (Bibliothèque royale, Harlay-49 ?).

 

Les Graffitis de DOMME attribués aux Templiers .

En 1970, le chanoine Tonnellier, historien et archéologue, réputé pour ses interprétations de gravures anciennes, avait entrepris l'estampage des graffitis présumés templiers de Domme. Il publia ses conclusions dans Archéologia n°32 (14 pages). Un certain nombre d'affirmations impressionnent alors les lecteurs: on lirait notamment sur les murs de la Porte des Tours des dates (1307, 1310, 1318) et des invectives contre le pape: « Clemens V destructor Templi », « Clemens est antichristus », « Ergastule ». En plus de dessins évidents et parfaitement authentiques, le chanoine décrit une scène étrange où figurent, d'après lui, une « foule grouillante », « une marée humaine », « une multitude », « un gigantesque tapis de têtes » où l' « on ne compte pas moins de 2050 têtes ». En réalité, ces soit-disant témoins d'un tableau de bataille n'existent pas et ont été imaginés sur l'interprétation outrancière des estampages qui constituent le procédé employé par le chanoine. Mais l'ecclésiastique est adulé par les dommois qui lui doivent une nouvelle notoriété et qui organisent des visites touristiques des « graffitis templiers ». Il est temps de préciser ici que les dessins gravés sur les parois de la Porte des Tours ne sont pas tous attribuables aux moines-soldats puisque certains ont été exécutés par des tâcherons tailleurs de pierres  avant la construction des murs et d'autres sont probablement attribuables aux compagnons itinérants ou aux pèlerins de Saint-Jacques de Compostelle. Des léopards ont probablement été dessinés par des Anglais et le profil de Louis XI ne peut avoir été dessiné par les Templiers puisque ce roi de France est né en 1423 (mais le chanoine l'admet). Reste aussi la possibilité de gravures appartenant aux soldats et sentinelles de garde en ces lieux qui étaient faits pour ça et ne convenaient nullement à servir de prison.

 

Domme, en haut, relevé du chanoine Tonnellier.

en bas, la réalité.


Le Chérubin de Tonnellier (extrait d'Archéologia)

La réalité.

Dans ce même article le dit chanoine en profite pour dénigrer les graffitis du château de Chinon et ceux du château de Gisors dont il doute de l'attribution templière, dans le but, probablement, de favoriser le site de Domme. Ce procédé avait déjà été mis au point par M. Peyrony à Glozel, pour favoriser Les Eyzies.

LA GENESE D'UNE RECHERCHE

Nous verrons par la suite ce qu'il faut véritablement penser des allégations de M. Tonnellier et ce qu'il faut retenir des relevés précis qu'a effectués Serge Avrilleau et son équipe en l'an 2000.

Chinon, forteresse royale.

En 1969 le professeur Raymond Mauny, de la Sorbonne, avait publié dans Archéologia (N°28) les graffitis du château de Chinon, situés tout près de chez lui. Raymond Mauny, spécialiste d'archéologie et d'histoire saharienne est désormais connu pour avoir activement participé à la mission Berliet au Ténéré en 1960. Il y étudie la préhistoire africaine. Mauny est un pragmatique, un cartésien et, dans sa publication, il fait preuve d'une extrême prudence, qui est la qualité fondamentale des vrais hommes de science; Il pense qu'il est possible d'attribuer les graffitis de la Tour du Coudray aux Templiers mais il se garde bien d'en faire l'affirmation absolue.

Le professeur Mauny montrant les gravures de La Roche-Clermault, le plus beau souterrain de France.

En 1970 le chanoine Tonnelier intervient alors dans les Tours de la Porte Est de la bastide royale de Domme où il effectue un long relevé des graffitis importants qui s'y trouvent, par estampage, c'est-à-dire par application de buvards mouillés pressés sur les parois à coup de tamponnages multiples et reconstitution graphique des reliefs obtenus au moyen d'une encre noire sur un moulage secondaire restituant le positif à partir du négatif de l'estampage.

Dans sa publication, où les interprétations du chanoine laissent pour le moins perplexes bon nombre de chercheurs avertis, il affirme la paternité des gravures aux prisonniers Templiers, ce qui est sans doute vrai pour la plupart des dessins, mais il met en doute l'authenticité templière des gravures de Gisors et de Chinon. Notons au passage que le chanoine prévient le lecteur que certains dessins se laissent longtemps chercher et que, sans doute, ils auront disparu peu de temps après ses relevés.

Et dans le N°33 d'Archéologia paraît un nouvel article du chanoine Tonnellier où d'autres dessins sont révélés, pour la plupart réels et authentiques; On y trouve aussi de belles pages d'histoire rappelant les poursuites et les procès organisés par Philippe le Bel et Clément V contre les Templiers; le chanoine tente d'identifier certains prisonniers par la lecture de leurs armoiries gravées sur les murs et il convient lui-même d'une évidence: « Telle est cette merveilleuse page d'histoire, cachée dans la patine des vieilles pierres au point d'y être indiscernable ». D'autre part, qui a transformé en poisson (symbole chrétien) une « semelle à la poulaine » qui est un habituel emblème des marcheurs au long cours: Compagnons du Tour de France ou Pèlerins de Saint-Jacques-de-Compostelle ?

A Domme: des crucifix, des girandoles, des mains, des épées, des étoiles.

Enfin, dans le N°38 d'Archéologia, en 1971, paraît un dernier article du chanoine Tonnellier, en convalescence après un accident grave, où l'on trouve de nouvelles révélations sur les graffitis de Domme. On y apprend notamment que les 2050 têtes enchevêtrées sont celles de Sarrazins !!!

Ici intervient la science de la Sorbone:

Le professeur Mauny, qui ne s'en laisse pas conter, prend alors contact avec Serge Avrilleau qui appartient comme lui à la Société Française d'Etude des Souterrains, qui a organisé à Chinon en 1968 et en Dordogne en 1972, ses congrès nationaux. Après avoir pris contact avec les instances archéologiques de Bordeaux, ils se rendent tous les deux à Domme et constatent, sans difficultés, que bien des interprétations du chanoine sont assurément contestables. Ils concluent que l'auteur des estampages s'est sans doute laissé emporter par son idéologie chrétienne et a cherché à faire absoudre, post mortem, les chevaliers au blanc manteau, accusés à tort des crimes les plus horribles, au début du 14ème siècle. Et que, défavorisé par une vue légèrement déficiente il aura, de bonne foi, cru voir des signes débordant quelque peu de la réalité.

A Domme: Jésus crucifié. Les Templiers ne l'ont jamais renié !

(si les graffitis de la Porte des Tours sont bien leur oeuvre).

GISORS POSE SA CANDIDATURE

Popularisée par Gérard de Sède, l'affaire du château de Gisors est suffisamment célèbre maintenant pour que le Chanoine Tonnellier tente une analyse des graffitis que le donjon recèle et il en publie le résultat dans Archéologia N° 43 sous le titre « Le prisonnier de Gisors ou l'écroulement d'un mythe ». Cette fois, la méthode du chanoine est le dénigrement systématique des études de ses prédécesseurs. D'après lui, quelques lettres minuscules suffisent à démonter le mythe "Poulain" l'ésotériste enbastillé; il s'agirait de simples messages amoureux du prisonnier Elie de Beaumont inconsolable après la mort de sa belle Catherine de Basian. D'après lui les graffitis de Gisors ne seraient donc pas Templiers. Seuls ceux de Domme seraient authentiques. Il resterait alors à vérifier ceux du donjon de Bourdeilles relevés par les docteurs Brigitte et Gilles Delluc, et ceux de Royston Cave, près de Cambridge, relevés par Sylvia Beamon. Et que penser de ceux qui ornent les prisons du château de Grignols et du château de Lanquais relevés par Serge Avrilleau? Et ceux du donjon de Cravant, près d'Auxerre, étudiés par Ph.Sassier ? Et ceux du château de Berbezières en Charente, relevés par M. Bernard Arnoult ?

Monsieur Serge Ramond a créé un excellent Musée de la Mémoire des Murs à Verneuil-en-Halatte (Oise) (il est malheureusement décédé). Il met  lui-aussi en doute les interprétations du chanoine, il n'est pas le seul ni le premier.

A Domme, des toitures s'imposent ..... d'urgence !

Un relevé pragmatique est de rigueur.

Pour en avoir le cœur net, en toute impartialité, que faudrait-il entreprendre aujourd'hui pour faire le point sur cette affaire ? outre l'édification d'une toiture sur le site (chef-d'œuvre en péril) qui est à l'Epigraphie ce que Lascaux est à la Préhistoire, un relevé précis, honnête et pragmatique, sans a priori. C'est exactement ce qu'a entrepris Serge Avrilleau et son équipe (Philippe Lecamus, Jean Vives, René Ventenat, Raymond Dordognin, René Deuscher et les épouses de certains d'entre eux).

La lèpre verte gagne du terrain, comme à Lascaux.

Soutenus par le Maire de Domme, à l'époque Alain Bournazel, et avec l'assentiment de l'Architecte des Bâtiments de France, encouragés par MM Meynardie et Poulain, ces bénévoles passionnés ont entrepris le relevé de toutes les gravures existantes sur les murs de la Porte des Tours, au moyen de calques en polyéthylène fixés sur des cadres de bois. Au cours des années 1999 et 2000 ces relevés se sont poursuivis et sont actuellement presque achevés. Malgré le décès de deux membres de l'équipe, l'étude des plus beaux graffitis (templiers ?) de France et leur synthèse objective et pragmatique restent à faire et doit être poursuivie.

Hervé Poidevin s'y emploie (voir son site internet: références plus loin).

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On nous a demandé quelques gros plans, en voila quelques uns:

Une crucifixion.

Deux gravures de Domme.

Domme, une crucifixion et les doubles enceintes.

Domme, écus et croix bouletée.

DOMME, LA CROIX  "TEMPLIERE".                                       

Pour en savoir davantage au sujet des graffitis templiers en général et sur les interprétations du chanoine  (à Domme et ailleurs) voyez l'avis de Serge Ramond et de Hervé Poidevin dans le blog: http://lespierresdusonge.over-blog.com (Le faux dans l'archéologie du trait glyptographique). Voyez aussi l'ouvrage de J.L. Aubarbier: "La France des Templiers".

 

CONCLUSIONS DU

COLLOQUE DE CADOUIN

 

-Les Templiers étaient-ils coupables? 

            Certainement pas de ce dont on les accusait.

-Rapports entre les Manichéens, les Cathares, les Templiers et les Francs-Maçons ?

            Rapports complexes, douteux, probablement chimériques.

-Les codes templiers (existaient bel et bien).  le Baphomet: douteux.

-Que penser des estampages du chanoine Tonnelier? 

            En grande partie apocryphes.

Liste des Templiers enfermés à Domme:

-Rien ne prouve que des Templiers aient été emprisonnés à Domme et que les graffitis de la Porte des Tours soient leur oeuvre. Le doute subsiste cependant. Une commission d'experts doit impérativement inspecter ces graffitis et les archives les concernant. Leur interprétation exhaustive reste à faire ainsi que la réalisation d'une toiture sur le site car, répétons-le: ces graffitis sont authentiques, ils sont magnifiques. Seule l'interprétation abusive du chanoine est remise en cause.

            

 F I N



13/12/2005
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